COLD - 1

Il faisait froid.

Le soleil n'était pas encore visible. Plongeant la ville dans un bleu outremer profond.

Comme d’habitude, Héléna avançait d'un pas décidé, au milieu de la foule de mort vivants. Elle faisait comme eux, elle allait au travail. Si on pouvait appeler cela un travail. Sa profession ? Laveuse de voiture. D'ailleurs elle était en retard. La jeune femme pressa le pas. On ne voyait pas très bien à cause du brouillard mais elle connaissait les rues par coeur. Elle savait bien où et chez qui elle devait se rendre. 

Un courant d'air glacé pétrifia tout le monde…Puis la marche reprit. Ces gens... courbés,  gris, tête baissée et bien rangés, qui marchaient à une allure lente, la même pour tous, n'étaient ni les ouvriers, ni les bureaucrates, c'étaient tous les citoyens. Les habitants de cette cité autrefois si animée. Trop même. Un jour ne passait pas sans un crime, une révolte, un incendie volontaire, une bagarre ou quoi que ce soit dans ce genre. Tout cela n'existait plus dorénavant. L'ordre régnait sur la ville.

Elle arriva devant l'immeuble de son employeur. Il n'était pas là en ce moment mais avait laissé la carte de son garage sous une dalle. La troisième à gauche, devant le lampadaire encore allumé. La jeune femme la prit et la fis coulisser dans la fente et souleva tant bien que mal la porte du garage. Énorme et bien protégée. Héléna constata que l'employeur avait au moins daigné retirer les pièges. Quelle générosité! Elle pénétra dans l'antre après avoir refermé derrière elle, découvrant énorme voiture lustrée. Le dernier modèle. Normal pour une Elite. Héléna détestait les élites, mais elle lava quand même la voiture. Que pouvait elle faire d'autre de toute façon. L'ordre régnait sur la ville. 

La voiture était désormais plus brillante qu'avant. Héléna avait fait ce qu'elle avait pu. Ne pas la nettoyer aurait été du suicide. Elle soupira. Au moins, elle serait bien payée, pour une fois. L'employeur lui enverrai l'argent.

La jeune femme soupira tristement et s'en alla en prenant soin de fermer derrière elle. Elle avait d'autres voitures à laver. 18 en tout, pour aujourd'hui.

Le soleil commençait à se lever, mais il n'illuminait pas cette ville morte. Il ne l'illuminerai plus jamais.

Les rues étaient complètement vides. Les cadavres étaient au travail, et ils n'en reviendraient que la nuit. Elle était une des rares à pouvoir sortir pendant la journée. 

Héléna enchaîna donc les voitures durant toute la journée. Comme tous les jours depuis que tout était dans l'ordre. Lorsqu'elle eut terminé sa dernière voiture, celle d'un civil, elle regarda dehors. 

« Merde! »

La nuit était tombée, elle allait devoir rentrer avec les hordes de zombies, qui avaient fini leur journée. Elle sorti du garage. Ils étaient déjà là. Ceux qui terminaient le plus tôt. Héléna ne savait toujours pas si c'était des bureaucrates, des hommes d’affaire ou des ouvriers. Elle s'en fichait de toute façon. Ils étaient tous pareils.

Elle leur jeta un regard triste et se hâta de rentrer, sans leur accorder plus d’attention.

Après une longue marche, elle arriva enfin devant son immeuble. S’éloignant du groupe. C’était qu’ils puaient en plus. la jeune femme fit glisser sa carte dans la fente et l’énorme porte se sépara en deux, laissant passer la pauvre créature sans pouvoir qu’elle était.

Son appartement était le n° 345 et se trouvait au onzième étage. Ayant la phobie des ascenseurs, elle emprunta les escaliers. Bien propres mais sentant la mort. 

« comme dans toute cette ville » pensa la laveuse de voiture.

Arrivée dans son appartement, elle fit passer sa carte dans la fente et se se jeta dans son lit. Il était formellement interdit de verrouiller sa porte lorsqu’on était chez soi. Loi ridicule car les gens du gouvernement possédaient une carte spéciale, permettant d’ouvrir toutes les portes. Mais bon…La jeune femme avait abandonné l’idée de « chercher à comprendre » depuis bien longtemps.

Elle alla prendre sa douche, dîner et se posta à la fenêtre de sa chambre. On pouvaient voir ce qu’il se passait dans les appartements d’en face. Ils étaient seulement éclairés par la lumière des écrans de télé. La télé. Elle avait, elle aussi, participé à l’abrutissement de la population. Héléna n’avait pas de télévision, elle n’en voulait pas. Elle avait la radio. Radio qu’elle alluma. On était mardi. Le seul jour de la semaine où les infos passaient.

On annonçait 4 morts. Ce n’était pas énorme. L’ordre régnait mais chaque semaine avait son lot de morts, et il y en avait plus d’habitude… Les surhumains qui s’amusaient…

Les surhumains étaient ceux qui faisaient régner l’ordre dans cette ville. Le gouvernement se servait d’eux pour maintenir l’oppression et la terreur. Ils étaient la cause de la soumission et de l’extrême passivité des gens de cette ville. Comment étaient ils apparus ? C’était un grand mystère. Au départ, ils étaient des héros, ils s’étaient débarrasser de tous les criminels de cette ville. 

Au fil du temps, il s’est avéré que ces héros n’étaient en fin de compte pas si bon que ça. Des délits de plus en plus petits étaient punis de morts. Le régime était devenu, petit à petit, une dictature. Le droit de vote avait été supprimé, les gens avaient commencé à manifester…et énormément de sang avait coulé…le sang de ces gens bien sur. Les habitants avaient alors compris que les surhumains étaient des instruments de torture, servant à établir un régime d’oppression et de peur. Ils s’étaient alors soumis. Ils étaient devenu de bons travailleurs, gagnant un salaire misérable et travaillant au service du gouvernement. Gouvernement qui n’avait alors plus rien à craindre…Il n’y aurait plus d’acte de révolte, plus de parole de contestation ni même un regard que les juge. Ils avaient tous les pouvoirs.

Les surhumains, qui maintenaient l’ordre dans la ville, avaient le droit de tuer. Ils avaient tous les droits.

et alla enfin se coucher, rêvant d’un autre monde. Comme d’habitude...